Soliloque à deux voix.


    Le problème du couple, c’est un peu la bouteille à l’encre : on en tire tout ce qu’on peut en tirer, le pire te le meilleur, le banal et l’original. Prenez mille écrivains ou mille auteurs dramatiques : chacun aura « son » problème de couple à exposer et le fera à sa manière car il n’y a pas deux couples similaires et deux styles qui se recoupent parfaitement. C’est dire que le sujet est éternel.

 

 

    Curieusement, à quelques jours d’intervalle, deux pièces de théâtre évoquant ces problèmes de couple ont été ou seront présentées.

 

    Ce sera, mercredi, la célèbre pièce d’Albee, chef d’œuvre du genre « Qui a peur de Virginia Woolf ? » et durant ,trois jours, de jeudi à samedi derniers,  celle de notre compatriote Robert Birou  « Soliloque à deux voix », présenté par le théâtre du Cri, sous l’égide du Foyer culturel.

 

 

« Je suis quoi ? »

 

    Durant une heure trente nous vivons la vie d’un drôle de couple ; elle et lui, tout simplement. Ils ne se 

déchirent pas comme dans Virginia. Ils parlent, chacun en aparté, semblent se chercher, s'éloigner, se chercher de nouveau. Ils n’oublient qu’à la fin de la pièce qu’un couple est composé de deux personnages qui présentent une image du parallélisme (deux droites qui ne se rejoignent jamais). Le titre est suffisamment explicite…

 

    Lui, c’est le poète qui, sur un coup de tête, a rompu avec les compromissions et les servitudes de la société et qui s’est enfermé dans une sorte de tour d’ivoire.  Elle – son contraire – a choisi la vie en société, avec en arrière-plan un relent de trottoir. Elle rend visite au «  philosophe crasseux » qui geint : « Je pense, donc je suis. Mais je suis quoi ? ». Elle lui tend la main, tâche de le comprendre, de renouer. Il semble accepter, se rétracte. Il s’empêtre dans ses contradictions et elle essaie de l’en tirer.

 

    A coups de tempêtes, ces deux navires qui suivaient des voies opposées se rejoignent et tout un jeu de concessions fera le reste. Mais tout n’est pas simple. La Société est là. Pour lui échapper il ne reste qu’à emprunter un navire spatial.

 

De beaux éclairs

 

 

    Robert Birou a écrit ce Soliloque, une pièce très forte, traversée de beaux éclairs, d’humour grinçant, où nous retrouvons l’auteur de café-théâtre. Acteur lui-même, et excellent, plein de son personnage, il a trouvé en son épouse, Michèle, une partenaire solide, qui sait nuancer un jeu difficile, tout en progressions et reculades.

 

      La mise en scène est « collective » et, outre Robert et Michèle Birou, fait intervenir Francine Laborde, Pierre Devaux, Michel Reygnier. Eclairage et son ont été le domaine de Robert Peyrillou. A noter des décors originaux, en forme de danse macabre stylisée, de Pierre Descaux, l’un des talentueux « Chpenneu- neux » d’Ayen.

 

    Il est regrettable que ce spectacle ne soit pas présenté sur une scène du centre ville. La rue Auguste-Blanqui, les Chapélies, c’est bien mais c’est loin et beaucoup de spectateurs répugnent à accomplir le trajet. A moins qu’il n’y ait, de la part des auteurs, un parti pris de marginalité géographique.

M.P.